Je me suis levée avec mon amie à 6 heures ½. Nous
avons été voir en compagnie de M. Lagarde, Gaby et Louis la demeure souterraine
où vit un pauvre fou de Montagnac qui s’appelle Emile Valat et que l’on a
surnommé Milou. De là, ces messieurs nous ont quittés pour aller à Montagnac.
Quant à nous, nous sommes retournées à la campagne. Vers les 9 heures nous
faisions de la musique à 4 mains quand tout à coup la mère de Louise nous a crié
: venez voir si vous savez ce que c’est ; on dirait un automobile égaré. Nous
ne distinguions rien tout d’abord, mais, à la fin, nous avons reconnu les deux
personnages qui n’étaient autres que mon petit Henri Sales et son cousin
Georges M. Nous sommes allées à leur rencontre afin de les remettre dans la
bonne voie. Après les salutations d’usage mon petit Henri a voulu s’en
retourner. Quant à Mr M. nous l’avons amené jusqu’à la campagne. Ces messieurs
n’étant pas encore rentrés de leur promenade matinale, nous avons continué
notre étude de piano. Je suis parvenue à apprendre l’air de Poupoule à Geo.
Enfin, lorsque ces messieurs sont arrivés, après avoir joué quelques morceaux
de musique, entre autres, notre fameuse polka à 4 mains, nous avons fait une
partie de croquet. J’ai eu la chance d’avoir pour partenaires Geo et M. C. Mes
adversaires étaient : Louise, Louis et Gaby. La partie très animée a été
interrompue par le déjeuner. A table j’étais entre A. C. et E. J. le repas, ce
moment si redouté par moi à cause des conversations qui s’y tiennent, s’est très
bien passé. Après déjeuner, nous avons organisé une petite sauterie. J’ai tenu
le piano tout le temps, au grand désespoir de ces messieurs. Tant pis pour eux.
S’ils s’imaginent que je vais tomber en extase devant leurs quatre poils de
moustache et leurs beaux yeux, ils se trompent bien. Le plus naturel d’eux tous
est Géo. Aussi, est-ce vers lui que vont toutes mes sympathies. Mais j’ai
promis à Louis de ne pas y céder. Je tiendrai parole. M. C. m’amuse beaucoup
avec sa bouche en cul-de-poule et ses yeux au plafond. Je n’aime pas les
personnes qui ne regardent jamais en face. Cela dénote un manque de franchise.
Beaucoup de forme chez lui ; pas de fond du tout. Je plains celle qui sera sa
femme ! Nous avons ensuite joué au nain jaune. J’ai eu la chance (chose
extraordinaire chez moi) de gagner 4 sous. Il y en aura pour offrir un cigare
au papa Lagarde. Les petits papiers ont terminé notre après-midi. Il s’en est
rencontré quelques-uns de tordants.
Mais, avant dîner, nous avons vite mis une partie de
cachette en train. Elle a été très animée, et j’ai vu le moment où mon pauvre
petit cœur allait me jouer un vilain tour. Il était si gentil, si plein de délicates
attentions pour moi ! Mais, je me suis domptée ; rien n’a paru. Nous nous
sommes séparés comme deux bons camarades, mais rien de plus. Nous avons été
tous en chœur l’accompagner jusqu’à mi-chemin de Montagnac, puis il est reparti
à bicyclette pour Béziers.
De retour à la campagne nous avons fait de la musique.
Le dîner a été très gai. Après dîner, nous avons rouvert le piano ; l’on a
chanté, dansé, fait toutes sortes de petits jeux ; des petits papiers,
etc.. Minuit nous a surpris jouant au nain jaune. A deux heures du matin, nous
avons organisé une sauterie dans le jardin ; il était près de trois heures
lorsque nous avons songé à regagner nos dodos respectifs. Ah ! L’exquise
journée ! Puisse-t-elle avoir beaucoup de sœurs. Et dire que c’est la
présence d’un seul être qui m’a donné tout ce bonheur !
Sur la photo : Henriette (assise) et Claire
Geo rentre à Béziers à vélo, qui est à 30 kilomètres environ…
Geo rentre à Béziers à vélo, qui est à 30 kilomètres environ…
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